Aux États-Unis, l’ampleur des inégalités raciales a récemment entraîné des émeutes dont s’est fait écho la presse. Minneapolis, dans l’État du Minnesota, est la ville où ces manifestations ont commencé. Mais c’est également là que les militants et militantes d’Appetite for change tentent de réduire ces inégalités grâce au pouvoir de l’agriculture urbaine.
Le groupe d’Appetite for change a contribué à mettre en place sept jardins communautaires au nord de Minneapolis, le quartier le plus pauvre de la ville, dont 90% des 67 000 habitants sont des personnes noires, latino ou asiatiques. Le constat dressé par les membres du collectif est frappant : un tiers des habitants du quartier souffre d’hypertension artérielle et d’obésité. Le dernier supermarché encore en activité a été détruit lors des émeutes de cette année, ne laissant place pendant des mois qu’à des fast-foods et des supérettes ne fournissant que des aliments industriels trop gras et sucrés, et complétement dénaturés.
C’est d’ailleurs parce que ce phénomène se reproduit à l’échelle nationale que l’épidémie de Covid entraîne plus de décès chez les populations les plus pauvres, notamment les minorités ethniques, obésité et hypertension étant des facteurs aggravants. La discrimination et l’exclusion de certains groupes encouragent la pauvreté, et celles-ci entraînent d’importantes inégalités en rapport avec la santé, notamment l’accès à une alimentation saine.
C’est contre cela que luttent les militants et militantes d’Appetite for change. Un des grands champs d’action de ce collectif est la pédagogie alimentaire. Leur objectif est d’amener leur communauté vers d’autres habitudes de consommation en ouvrant les portes des jardins à la collectivité, notamment aux jeunes des écoles alentour. À côté de cela, le collectif distribue de la nourriture gratuitement aux habitants et habitantes du quartier. Depuis le début de l’épidémie, les jardiniers et jardinières ont réussi à distribuer des cagettes de légumes à 300 familles par semaine !
Latasha Powell (en photo ci-dessous), une des cofondatrices d’Appetite for change, témoigne :
Le fait que des personnes meurent tous les jours dans mon quartier, et que beaucoup de ces morts ont quelque chose à voir avec la manière dont ils s’alimentent, c’est inacceptable.
Le choix de passer par l’action directe (donner de la nourriture gratuitement aux habitants et habitantes) vient donc du constat d’un manque flagrant d’attention porté à la santé des habitants du Nord de Minneapolis, accompagné d’une incapacité à faire changer les structures existantes. Latasha Powell a en effet essayé pendant des années de faire diversifier les rayons des supermarchés pour que s’y ajoutent plus de produits frais et sains, sans succès.
Princess Haley (en photo ci-dessous), une autre cofondatrice d’Appetite for change, partage elle aussi son point de vue. Cette membre active du collectif est aussi l’une des bénéficiaires de ses actions. En effet, son fils est décédé d’une balle perdue à côté d’un des jardins collectifs. D’abord traumatisée, elle témoigne : « Je n’ai pu me sortir de ça que grâce au jardin. Pour moi, le jardin est vraiment un endroit d’apaisement, thérapeutique ». Cela lui a permis de voir les problèmes de pauvreté et de violence autrement. Si ses voisins ont si peu accès à de la nourriture de qualité, alors que celle-ci est essentielle au bien-être, alors c’est logique qu’ils ne puissent pas aller bien… Et ce, particulièrement en temps de crise sanitaire et sociale.
Le sens du nom George – Et je parle de George Floyd – son nom signifie « le fermier ». […] Son nom représente la terre. […] [Ce jardinage,] c’est une source de justice. Quand les étagères des supermarchés sont vides, les jardins nous nourrissent. (Princess Haley)
N’oublions pas que les problèmes écologiques et sociaux sont indissociables, car ils ont pour source le même système défaillant et fondamentalement injuste. Luttons ensemble contre les inégalités qui dévorent le monde !
Source : A Garden Is The Frontline In The Fight Against Racial Inequality And Disease, NPR